J'étais sortie du lycée, un samedi après-midi. Nous passons déjà trop de temps enfermés dans des salles de classes, à mon goût, alors pas la peine de le faire même quand nous avons du temps libre. Je marchai d'un pas léger, et je dépassai les quelques personnes qui traînaient dans la rue. C'est fou que si peu de gens sortent de chez eux! Et puis ça m'étonnerais que tous les lycéens s'occupent de leurs travaux ou de leurs révisons. Je marchai un bout de temps, jusqu'à ce que je me retrouve devant un jardin public. Il était désert. Je soupirai. C'est fou ce qu'à quinze ans on peut s'ennuyer! Je poussai la porte du petit parc, et me dirigeai vers une des balançoires à bascule. Les moments heureux que j'avais passé dans ces parcs me revinrent à l'esprit. Je m'assis sur l'une des extrémités et me sentis soudainement très seule. Décidemment, la solitude ne me réussissait pas. J'avançai ensuite jusqu'aux balançoires, et je me posai dessus. Je me mis à me balancer d'avant en arrière, mais avec le peu de force que j'ai dans les bras, je n'allais pas très haut. Cela renforçait ma sensation de solitude. J'allais renoncer et rentrer, mais en me levant j'aperçus un grand jeune homme, aux cheveux écarlates, assit tout seul sur un banc. Ma timidité allait me faire partir, mais je m'approchai finalement de lui.

- Heu... Bonjour, est-ce que tu pourrais me pousser s'il te plaît?

Je l'avais dis comme ça, sans réfléchir, car je savais que sinon je n'aurais jamais osé. J'étais gênée, je n'avais même pas employé une seule formule de politesse. Je lançai tout de même un regard furtif vers la balançoire pour lui faire comprendre...

Week-End. Semaine. Décidément, Akaito ne voyait pas bien la différence entre les deux. & quoi ? L'absence de cours ? Pas de quoi se réjouir. Des jours de plus à ne rien faire. A s'ennuyer. Parce que oui, même s'il aimait sa solitude, il lui arrivait de s'ennuyer...parfois. Aujourd'hui par exemple. Il faisait un temps magnifique. Le printemps se montrait enfin, le soleil était présent, et l'odeur du parc était agréable. Une odeur de sucre, provenant du stand de sucrerie, installé là. Une odeur de fruit aussi, provenant surement du glacier un peu plus loin. & pourtant, il n'y avait vraiment rien à faire. Marcher ? Non, trop fatiguant. S'asseoir...et ne rien faire ? Pourquoi pas.
Il prit donc la direction d'un banc, face aux balançoires et se laissa tomber dessus. Au bout de quelques minutes, il entendit une petite voix féminine.

- Heu... Bonjour, est-ce que tu pourrais me pousser s'il te plaît?

Il leva la tête vers elle. Elle était assez petite, frêle, elle ressemblait à une enfant. Elle jeta un petit regard vers la balançoire, qu'il regarda un moment lui aussi...avant de se lever sans un mot, et de s'y diriger.

Il leva la tête vers moi. Je rougis un peu tandis qu'il me détaillait. Je crus qu'il n'allait pas bouger, mais après avoir regardé longuement la balançoire, il se leva sans un mot et s''y dirigea. Une appréhension montait en moi. Pourquoi? Il avait pourtant eu la gentillesse d'accéder à ma demande... Après m'être installée sur le jouet, je le regardai timidement et lançai d'une voix chaleureuse:

Merci beaucoup.... Je me sentais un peu seule!

Je lui souris à pleines dents avant de m'aggriper à la corde qui tenait la balançoire. Il me poussa tranquillement, et je profitai de ce bonheur que je n'avais pas ressenti depuis longtemps. C'était comme si je retombais en enfance.

En fait... Comment t'appelles-tu ?

J'avais envie d'en savoir un peu plus sur lui, qui semblait tellement perdu dans ses pensées quelques minutes avant...

Lentement, il se mit à la pousser. Lentement, oui, pour éviter de lui faire peur, ou de la faire tomber. Lentement, comme il le faisait si souvent quand il était enfant, avec Kaito. Une ébauche de sourire, s'installa sur ses lèvres, tandis que ses souvenirs heureux, lui revenaient. Il ne prêta même pas attention, à ses remerciements.

En fait... Comment t'appelles-tu ?
- ... Akaito. Et toi ?

Ca ne lui ressemblait pas, non, de rendre service. Mais voilà. Il s'ennuyait, et l'allure enfantine de cette jeune fille, l'avait "attiré".

Il ne semblait plus m'écouter, encore une fois perdu dans ses pensées. Il me poussait sans bruit, sans mouvements brusques. Il commençait à se détendre, cela se sentait dans ses mouvements moins secs.

Je m'appelle Momo...

Je profitai, des journées belles comme celle-ci, il n'y en avait plus beaucoup. J'avais eu de la chance, des gens gentils, ou du moins serviables comme lui , on n'en croisait plus beaucoup. Je replaçai une mèche de cheveux derrière mon oreille, mais en reposant ma main je frôlai la sienne, qu'il retira promptement. Je rougis un peu, et bafouillai des excuses inutiles.

Ce silence était reposant. Les gens étaient rarement si silencieux, si apaisants.

Je m'appelle Momo...

C'est tout ce qu'elle avait dit, depuis qu'elle se balançais. Rien de plus. Son nom. Akaito, continua un moment de la pousser, sans prendre le temps de répondre. Il ne s'ennuyait plus. Il était au calme, tout était parfait. Elle n'avait pas troubler son bien être.

- Akaito.

Après tout, elle méritait bien une réponse. Il la poussa encore, et il sentit sa main se posa brièvement sur la sienne. Ce contact avait été doux, elle avait la peau douce comme celle d'un jeune enfant. Elle se mit à se confondre en excuse, puis se tut de nouveau. Pour toute réponse il la poussa un peu plus fort, en souriant brièvement.

Pourquoi parler quand on peut se taire ? De toute façon, je ne trouvais rien à lui dire, lui qui paraissait si imposant. J'avais peur de dire une parole de trop, ou de raconter quelque chose d'inutile, qui le désinteresserait complètement de ma personne. Je pourrais passer des heures, comme ça, à me balancer au rythme de ses mouvements de bras ni trop brusques ni trop lents. Il ne me répondit pas. Je ne le pris pas mal, il devait penser que je m'en fichais un peu. Décidemment, cet homme m'intriguait. De toute façon, quelles étaient les chances qu'on se revoit ? Il rompit ce silence qui commençait à m'oppresser. Un mot.

Akaito.

Je soupirai. Je ne lui répondis rien. A quoi bon lui dire que j'étais enchantée si je lui parlais juste parce qu'il avait eu l'amabilité de me faire plaisir ? Après avoir posé ma main sur la sienne, il ne me répondit pas. Pour me dire quoi, de toute façon? Je ne sais même pas pourquoi je m'étais excusée. Il me poussa plus fort, je m'aggrippai de justesse à la corde qui tenait la balançoire. Je penchai la tête de côté et fermai les yeux.

Juste ... Qu'est ce que tu faisais, tout seul dans ce parc ?

J'esperais que ma question n'était pas trop indiscrète, et je me demandais si il allait me répondre. Après tout, il n'avait aucune obligation de le faire. Dans ma tête, une douce mélodie commença à se jouer, et mes lèvres formaient les syllabes, les mots, sans que je prononce un seul son. Je me laissai bercer par la chanson, en attendant sa réponse qui n'arrivera peut être jamais.